Christian MICHAEL: Relations familiales

Avec l'âge avancé, on laisse parfois passer revue, entre autres, les relations familiales de son enfance. Pour trouver la clef de différents problèmes ou questions, je pense qu'il faut plonger dans la situation de nos parents, avant la naissance de mon frère Antoine (appelé Toni)[1] et moi-même[2].

Notre père[3] était Maître d'école primaire pendant 15 années dans la commune deLandquart, dans les Grisons. Dans ce village, il avait jouit du statu d'une "Personne de respect publique", et selon les commentaires de quelques uns de ses écoliers (20 ans après sa mort), il était bien aimé.

Quant il épousa la sommelière du restaurant FALKEN à Landquart, Anna Schwendener[4], notre future mère, il élevait cette brave fille dans le rang de "Frau Lehrer", titre avec lequel Maman fût honorée encore longtemps après la mort de Papa!

Peut-on s'imaginer quel désastre représentait le décès du jeune Papa, à ses 35 ans, pour notre chère Maman?: la perte du partenaire, ses dettes bancaires provenant de l'achat de meubles pour le mariage (trois ans avant sa mort!), perte du statu social, en sainte dans le 6me mois avec son deuxième fils; une catastrophe personnelle sans égal!

Papa, fils d'une grande et pauvre famille montagnard, à Pagig-Grisons, absolvait le séminaire à Coire, grâce à des subventions cantonales, qu'il remboursait, mais pas totalement, par acomp-tes annuels jusqu'à son décès en 1926. - En plus, il soutenait financièrement régulièrement les parents dans leur village. Par conséquent, lors du mariage, il se présentait comme fiancé "sans un sou dans la poche", obligé à demander un crédit à la Banque Cantonale des Grisons pour acheter un minimum de meubles! Heureusement, Maman pouvait céder cette dette et une part des meubles à sa belle-sœur Margaret, respectivement son beau-frère Simon Tschurr.

Perdue comme veuve, avec un bébé d'un an et demi, avec le deuxième en sainte, Maman fuit avec sa petite famille depuis Landquart vers Steinen-Buchs SG, dans la maison natale, gérée par son frère ainé.

Avant la naissance de mon frère, Maman me logeait, à l'âge de 16 mois, chez son beau-frère à Pagig où, selon les dires, on me casait durant la nuit dans une crèche, à l'écurie des vaches, faute de poussette ou lit pour bébés. - Je ne m'en souvenais, bien entendu, jamais et je n'en emportais pas de traces corporelles non plus!

Les finances de notre Trio étaient minuscules, soit se basaient sur les payements modestes de la Caisse de pension de l'Association des Maîtres d'Ecoles Primaires Suisses, complétés occa-sionnellement par des rémunérations de Maman pour des travaux de service, dans l'hôtellerie et dans des ménages privés. – Le support par des Organisations bénévoles (PRO JUVENTUTE et autres) éprouvais-je, âgé de moins de 10 ans, comme honte, de même que, de temps à autres, l'achat sur crédit à la COOP. Cette humiliation (comme je l'interprétais) pesait sur mon âme pendant de longues années.

Suite à une dispute[5] grave et "inutile" avec son frère, Maman décida – à l'âge de 7 et 8 ans de ces deux garçons - de déménager dans un autre logement sur la place de Buchs, mais pour
2 ans seulement. Ensuite, en 1936, nous nous embarquions pour le Canton des Grisons, où Maman spéculait de trouver des facilités pour les années scolaires supérieures de ses fils
- citoyens grisons - et même pour leurs apprentissages.

Nous tombions sur Zizers[6], petite commune 10 kilomètres de distance de la Capitale Coire, où Toni et moi fréquentions les 3me respectivement 4me classes primaires d'une des deux écoles d'hiver (Halbjahresschulen), soit celle des Protestants!

Animés par une connaissance, nous quittions Zizers pour reprendre à Schiers (dans le Prätigau) le restaurant "Gemeindestube" sans alcool. Son président, professeur à l'Institut Evangélique privé du même endroit, nous promettait que nous pourrions compter sur quelques écoliers externes du gymnase, comme pensionnaires permanents, qui auraient représentés, dans notre calcul d'exploitation, la base des recettes. - Malheureusement l'on ne nous consentit jamais ces pensionnaires, et avec la fréquentation pauvre du publique indigène, nos calculs restaient mauvais.

Les bilans négatifs nous forçaient finalement à un nouveau déménagement, soit à Coire, capi-tale des Grisons, où, au moins, Toni et moi pouvaient fréquenter gratuitement (contrairement à Schiers) l'Ecole secondaire  et, plus tard, trouver des places d'apprentissages commerciaux.

L'avantage pour Toni et moi du "détour Schiers" était l'excellente école primaire du Séminaire Evangélique où nous pouvions rattraper les lacunes de la demi-année scolaire précédente de Zizers.

A Coire, Maman essayait de gagner notre vie avec une petite Pension, située à la Kornplatz, passagèrement avec des réfugiés juifs venant d'Autriche qui étaient obligés de faire escale en Suisse, attendant leurs visas pour les USA. - Au rez-de-chaussée de la maison se trouvait le Magasin pour denrées coloniales de la Famille Kleger. Dans notre temps libre, Toni et moi aidaient Madame Kleger dans le conditionnement de sucre, sel, etc., ces marchandises étant délivrées en son temps dans des sacs de 50 et 100 kg.

Cette affaire de Pension était également non-rentable, et nous l'abandonnèrent en faveur d'un petit logement à la Splügenstrasse, financé par mon salaire de Jeune Commerçant et celui du frère Toni, encore apprenti commercial. - A la fin de son apprentissage, j'essayais de trouver pour Toni une place de travail comme employé de bureau, afin d'assurer l'entretien de Maman pendant mon absence, parce' que je voulais absolument émigrer en Suisse romande, pour ap-prendre le Français qui me manquait terriblement durant l'apprentissage et pendant le bref laps de temps comme employé de bureau dans la même Société à Coire.

Des recherches prolongées pour trouver une place de travail en Suisse Romande furent enfin à un résultat positif; je pouvais me présenter en 1946 comme Comptable chez
ELEXA SA[7] électricité, Neuchâtel, où je restais 3 ans[8], finissant comme "Chef de bureau".

Me voyant à la fin de ma carrière chez ELEXA SA, je cherchais en 1949 une nouvelle place de travail pour compléter mes connaissances et mon expérience professionnelle et je tombais sur NEPTUN SA, Compagnie de navigation et de transport à Bâle-Port fluvial rhénan.



[1] né 18.9.1926

[2] né 27.5.1925

[3] né 1891

[4] Né 28.2.1897

[5] dont j’étais la cause

[6] sur recommandation du Pasteur J.Klaas

[7] Petite entreprise artisanal avec un effectif de 40 personnes

[8] voir mon Couriculum vitae